Du pain et des jeux. On connaît l’amour des romains pour les jeux du cirque de toutes sortes : combats, courses de chars, chasses… Les empereurs et les notables savaient s’attirer les faveurs de la foule en organisant des jeux. Que ce soit pour marquer un début de règne, célébrer un anniversaire ou une victoire militaire, les bonnes raisons de se presser sur les gradins pour assister au spectacle ne manquaient pas. Très populaires, les jeux du cirque ont logiquement fait partie des thèmes développés sur les frappes monétaires.
Sommaire
Le Colisée
Lorsque l’on pense aux jeux romains, l’image qui vient immanquablement à l’esprit, c’est celle du Colisée. Cet imposant amphithéâtre, incontestablement le plus connu du monde romain, reste un des symboles forts de la ville éternelle. Il est encore visité aujourd’hui par des touristes venus de tous les horizons.
La construction du Colisée a débuté dans les années qui ont directement suivi l’accession de Vespasien au pouvoir. Vespasien n’eut toutefois pas la chance de voir la construction achevée de son vivant. Les honneurs de l’inauguration revinrent à son fils Titus, qui organisa des jeux prodigieux pour célébrer l’événement, lors de son très court règne. A cette occasion, des milliers de bêtes furent acheminées vers Rome pour être tuées dans l’enceinte du Colisée.
C’est aussi pour célébrer cette inauguration que fût émis une rare monnaie, aujourd’hui très prisée des numismates. Un sesterce au revers duquel est reproduit le Colisée. La taille du module permet d’en retracer de nombreux détails. On peut y voir le quadrige surplombant l’entrée principale, de nombreuses statues nichées sous les arches, dans les étages, mais aussi une multitude de têtes représentant la foule massée sur les gradins. Jusqu’à 60 000 spectateurs pouvaient prendre place dans les murs du Colisée pour suivre les jeux.
![Une des rares monnaies montrant le colisée au revers, avec de nombreux détails. Titus est représenté à l'avers, assis au milieu de dépouilles, allusion probable à son prestige militaire. [© Berlin, Münzkabinett der Staatlichen Museen]](https://www.quadrigatus.com/wp-content/uploads/2023/09/titus_sesterce_800x400.jpg)
Une des rares monnaies montrant le colisée au revers, avec de nombreux détails. Titus est représenté à l’avers, assis au milieu de dépouilles, allusion probable à son prestige militaire. [© Berlin, Münzkabinett der Staatlichen Museen]
Titus eut aussi recours à d’autres images pour symboliser et représenter les jeux. Sur certains de ses deniers apparaît un éléphant cuirassé, tel que l’on en poussait dans l’arène, afin de les faire affronter des bêtes sauvages. Les romains appréciaient en effet les spectacles sanglants mettant en scène des bêtes exotiques, dressées les unes contres les autres.
Denier de Titus montrant au revers un éléphant cuirassé, comme on en voyait vraisemblablement combattre des bêtes sauvages dans l’arène. [© American Numismatic Society]
Denier de Domitien, émis dans le cadre des jeux séculaires. Sur le revers, un hérault se tient à proximité d’une colonne sur laquelle sont lisibles les mots COS XIIII LVD SAEC FEC. [© American Numismatic Society]
Le Circus Maximus
Le Colisée n’était pas le seul endroit de Rome à drainer des foules avides de jeu. Un autre monument, situé à peu de distance d’ailleurs, attirait lui aussi les masses. C’est au Circus Maximus que de nombreux habitants de Rome pouvaient assister à des courses de chars aussi spectaculaires qu’effrénées. Le monument, plus ancien que le Colisée, a traversé de multiples périodes. Érigé du temps de la République, vraisemblablement vers le IIIème ou IIème siècle av. J.-C., le Circus Maximus a été remanié plusieurs fois au fil du temps.
De nombreuses figures politiques romaines ont apporté leur pierre à l’édifice. Détruit lors de l’incendie qui ravagea Rome sous Néron, le Circus Maximus fût reconstruit sous les Flaviens. Trajan au IIème siècle ap. J.-C. s’est à son tour beaucoup investi dans la rénovation du monument, qui a sans doute connu sous le règne de l’Optimus Princeps son apogée, pouvant accueillir jusqu’à 155 000 spectateurs, pas moins !
Le célèbre Circus Maximus, où pouvaient se voir des courses de chars, est bien représenté sur ce sesterce de Trajan. La Spina centrale est bien visible notamment. [© American Numismatic Society]
Trajan, qui savait soigner sa communication, n’a pas manqué, pour saluer la rénovation du Circus Maximus, de le représenter sur certaines de ces monnaies. Des exemplaires d’un sesterce nous sont parvenus, qui détaillent bien l’architecture de cet imposant bâtiment. On peut voir sur ces monnaies de bronze l’enceinte du Circus Maximus, percée de portes, décorée de groupes statuaires. La spina, placée au centre du cirque et autour de laquelle tournait les chars, est nettement identifiable, surmontée d’une obélisque installée du temps d’Auguste.
Des symboles durables au fil des siècles
Le Colisée et le Circus Maximus se rencontreront encore sur des monnaies postérieures à celle de Trajan, mais jamais plus avec le même niveau de détails. On les retrouve avec plaisir sur des monnaies émises par les Sévères notamment. Septime Sévère, qui donne de somptueux jeux séculaires, et son fils Caracalla frappent des monnaies d’or et d’argent qui offrent elles aussi de belles perspectives de ces monuments.
Une autre perspective intéressante du Circus Maximus sur un sesterce de Caracalla [© Münzkabinett Kunsthistorisches Museum]
Les combats, chasses, et autres courses ne sont bien sûr pas l’apanage des jeux séculaires. Ils sont organisés en toutes occasions, notamment pour marquer les anniversaires de la fondation de Rome, ou même pour célébrer d’importants succès militaires remportés aux confins de l’empire.
Les empereurs continuent à les représenter sur leurs émissions monétaires, sous diverses formes. Au-delà des architectures et des bâtiments, ou même des scènes mêlant quadriges et animaux de toutes espèces, les jeux sont souvent symbolisés par la présence d’un seul animal. L’éléphant, depuis les deniers frappés par Titus évoqués plus hauts, fait en effet des apparitions régulières, d’un règne à l’autre. L’imposant pachyderme, tête d’affiche des bêtes sauvages précipitées dans l’arène, en vient à incarner à lui seul l’image des jeux.
Éléphant au revers d’un denier de Caracalla. L’empereur avait donné des jeux pour célébrer une victoire militaire. [© American Numismatic Society]